Vous êtes chanteurs ou instrumentistes et vous souhaitez vous engager au service de la liturgie traditionnelle, n’hésitez pas à nous rejoindre !

La Schola Sainte Cécile chante dans la basilique Saint-Pierre de Rome au Vatican

Nous offrons des cours de chant gratuits chaque samedi de 16h30 à 17h30 : travail du souffle, pose de voix, vocalises, découverte du chant grégorien et du chant polyphonique.

Les Petits Chantres de Sainte Cécile - maîtrise d'enfants

Votre enfant a entre 8 et 15 ans et souhaite chanter ? Inscrivez-le aux Petits Chantres de Sainte Cécile (filles et garçons). Répétitions le mercredi à 18h30 et le dimanche à 10h30.

Retrouvez les partitions que nous éditons, classées par temps liturgique ou par compositeur. Elles sont téléchargeables gracieusement.

“…nous reconnûmes que l’île s’appelait Malte” (Actes XXVIII, 1) – Pèlerinage à Malte de votre Schola Sainte Cécile

A Foretaste of His Glory : Pèlerinage à Malte de votre Schola Sainte Cécile

Du 21 au 27 août, votre Schola Sainte Cécile, avec les grands-clercs de la paroisse Saint-Eugène – Sainte-Cécile (Paris IX), aura la joie d’être en pèlerinage sur les pas de saint Paul dans l’Ile de Malte. Cette île a en effet été l’une des toutes premières terres occidentales a avoir reçu l’évangile, du fait du naufrage du bateau romain qui transportait saint Paul captif à Rome pour y être jugé, comme le rapporte le livre des Actes des Apôtres aux chapitres XXVII (le naufrage) et XXVIII, 1-11 (le séjour de trois mois de saint Paul & de ses compagnons à Malte – la conversion des habitants). Nous y sommes accueillis par la communauté de l’église Saint-Paul de Birkirkara, où se célèbre la messe latine traditionnelle. Nous remercions d’ores-et-déjà M. le chanoine Doublet pour son accueil chaleureux. Voici la liste des messes & offices que nous chanterons au cours de ce pèlerinage :

Croix latine Lundi 21 août, 18h30 : 1ères vêpres de la fête du Cœur Immaculé de Marie (octave de l’Assomption) à l’église Saint-Paul de Birkirkara, Ile de Malte.

Croix latine Mardi 22 août, 10h : messe de la fête du Cœur Immaculée de Marie (octave de l’Assomption) à l’église Notre-Dame du Mont-Carmel de Mdina, Ile de Malte.

Croix latine Mardi 22 août, 18h30 : 2ndes vêpres de la fête du Cœur Immaculé de Marie (octave de l’Assomption) à l’église Saint-Barthélémy de Tarxien, Ile de Malte.

Croix latine Mercredi 23 août, 10h : messe de la fête saint Philippe Beniti à l’église du Christ-Roi de Paola, Ile de Malte.

Croix latine Mercredi 23 août, 19h : 1ères vêpres de la fête de saint Barthélémy, apôtre, à l’église du Christ-Roi de Paola, Ile de Malte.

Croix latine Jeudi 24 août, 10h : messe de la fête de saint Barthélémy, apôtre, à l’église Saint-Augustin de La Valette, Ile de Malte.

Croix latine Jeudi 24 août, 19h : 2ndes vêpres de la fête de saint Barthélémy, apôtre, à la basilique de Sainte-Hélène de Birkirkara, Ile de Malte.

Croix latine Vendredi 25 août, 10h : messe de la fête de saint Louis, roi de France, confesseur, à l’église Saint-Dominique de La Valette, Ile de Malte.

Croix latine Vendredi 25 août, 18h30 : 2ndes vêpres de la fête de saint Louis, roi de France, confesseur, à l’église Sainte-Marie de Birkirkara, Ile de Malte.

Croix latine Samedi 26 août, 10h : messe de Requiem à l’église Saint-Paul de Birkirkara, Ile de Malte.

Croix latine Samedi 26 août, 18h30 : 1ères vêpres du XIIème dimanche après la Pentecôte à l’église Saint-Paul de Birkirkara, Ile de Malte.

Croix latine Dimanche 27 août, 19h : messe du XIIème dimanche après la Pentecôte à l’église Saint-Paul de Birkirkara, Ile de Malte.

L'église Saint-Paul de Birkirkara, Ile de Malte, siège de la communauté traditionnelle de l'île.
L’église Saint-Paul de Birkirkara, Ile de Malte, siège de la communauté traditionnelle de l’île.
Le Chapitre de la Basilique Sainte-Hélène de Birkirkara, Ile de Malte

Méditation de Benoît XVI à la grotte de Paul à Malte

Chers Frères et Soeurs,

Mon pèlerinage à Malte a commencé par un moment de prière silencieuse dans la Grotte de Saint Paul qui, le premier, a porté la foi à ces îles. J’ai mis mes pas dans ceux des innombrables pèlerins des siècles précédents qui ont prié dans ce lieu saint, confiant leurs personnes, leurs familles et la prospérité de cette nation à l’intercession de l’Apôtre des Gentils. Je me réjouis d’être enfin parmi vous et je vous salue tous avec grande affection dans le Seigneur!

Le naufrage de Paul et son séjour de trois mois à Malte ont laissé un signe indélébile dans l’histoire de votre pays. Ses paroles à (l’adresse de) ses compagnons, avant son arrivée à Malte, nous sont rapportées par les Actes des Apôtres et ont constitué le thème retenu pour votre préparation à ma visite. Ces paroles – “Jehtieg izda li naslu fi gzira” -, dans leur contexte originel, sont une invitation au courage devant l’inconnu et à une confiance indéfectible dans la mystérieuse Providence de Dieu. Les naufragés ont été, en effet, chaleureusement accueillis par le peuple maltais, selon l’exemple donné par saint Publius. Dans le plan de Dieu, saint Paul est ainsi devenu votre père dans la foi chrétienne. Grâce à sa présence parmi vous, l’Évangile de Jésus Christ s’est profondément enraciné et a produit des fruits non seulement dans la vie des personnes, des familles et des communautés, mais aussi dans la formation de l’identité nationale de Malte et dans sa culture vivante et singulière.

Le labeur apostolique de Paul a aussi porté un fruit abondant à travers les générations de prédicateurs qui ont suivi ses pas, et particulièrement dans le grand nombre de prêtres et de religieux qui ont imité son zèle missionnaire en quittant Malte pour porter l’Évangile vers des rives lointaines. Je suis heureux d’avoir eu l’opportunité de rencontrer aujourd’hui beaucoup d’entre eux dans cette église Saint-Paul, et de les encourager dans leur vocation pleine d’audace et souvent héroïque. Chers missionnaires, je vous remercie tous, au nom de toute l’Église, pour le témoignage que vous rendez au Seigneur Ressuscité et pour vos vies consacrées au service des autres. Votre présence et votre activité dans tant de pays du monde fait honneur à votre pays et témoignent d’un élan évangélique profondément ancrée dans l’Église de Malte. Demandons au Seigneur de susciter un plus grand nombre d’hommes et de femmes pour poursuivre la noble mission d’annoncer l’Évangile et d’oeuvrer pour le progrès du Règne du Christ sur toute terre et chez tous les peuples!

L’arrivée de saint Paul à Malte n’était pas programmée. Comme nous le savons, il était en route pour Rome quand une violente tempête s’est levée et que son navire s’est échoué sur cette île. Les marins peuvent bien tracer la route du voyage, mais Dieu, dans sa Sagesse et dans sa Providence, construit son propre itinéraire. Paul, qui avait rencontré d’une manière retentissante le Seigneur Ressuscité sur la route de Damas, le savait très bien. Le cours de sa vie changea brusquement; désormais, pour lui, vivre c’était le Christ ( cf. Ph 1,21); toute sa pensée et son action étaient orientées vers la proclamation du mystère de la Croix et de son message de réconciliation offert par l’amour de Dieu.

Cette même parole, la parole de l’Évangile, a encore aujourd’hui la force de pénétrer dans nos vies et d’en changer le cours. Aujourd’hui le même Évangile prêché par Paul continue d’interpeller la population de vos îles à la conversion, à une vie nouvelle et à un avenir d’espérance. Me trouvant parmi vous comme le successeur de l’Apôtre Pierre, je vous invite à écouter de nouveau la Parole de Dieu, comme l’ont fait vos aïeux, et à la laisser changer vos manières de penser et la manière de conduire vos vies.

Depuis ce lieu saint d’où la première annonce apostolique s’est propagée dans toutes ces îles, je lance un appel à chacun de vous à faire sien l’exaltant défi de la nouvelle évangélisation. Vivez toujours plus pleinement votre foi avec les membres de vos familles, avec vos amis, dans vos quartiers, dans votre lieu de travail et dans l’ensemble du tissu social maltais. Je vous invite particulièrement vous les parents, les enseignants et les catéchistes à parler aux autres de votre lien vivant avec Jésus Ressuscité, spécialement aux jeunes qui sont l’avenir de Malte. «La foi s’affermit lorsqu’on la donne [aux autres]» ( cf.Redemptoris Missio, 2). Croyez que le temps que vous consacrez à la prière constitue vraiment une rencontre avec Dieu qui, dans sa très grande puissance, touche le coeur de l’homme. Ainsi, vous introduirez les jeunes à la beauté et à la richesse de la foi catholique, et leur donnerez une solide catéchèse en les invitant à une participation toujours plus active à la vie sacramentelle de l’Église.

Le monde a besoin de ce témoignage! Face aux si nombreuses menaces qui pèsent sur le caractère sacré de la vie humaine et sur la dignité du mariage et de la famille, nos contemporains n’ont-ils pas besoin qu’on leur rappelle constamment la grandeur de notre dignité de fils de Dieu et de la noble vocation que nous avons reçue dans le Christ? Les sociétés n’ont-elles pas besoin de se réapproprier et de défendre ces vérités morales fondamentales qui restent le fondement d’une liberté authentique et d’un progrès véritable?

À l’instant, alors que je me tenais devant la Grotte, j’ai médité sur le grand don spirituel ( cf. Rm 1,11) que Paul a donné à Malte, et j’ai prié pour que vous puissiez garder intact l’héritage que le grand Apôtre vous a légué. Que le Seigneur vous confirme ainsi que vos familles dans la foi qui agit par la charité ( cf. Ga 5,6), et fasse de vous des témoins joyeux de l’espérance qui ne déçoit jamais ( cf. Rm 5,5). Le Christ est ressuscité! Il est vraiment ressuscité! Alléluia.

Le Pape Benoît XVI et l'ancre découverte en mer le 24 avril 2005 et provenant très probablement du navire qui transportait saint Paul & qui fit naufrage à Malte.
Le Pape Benoît XVI et l’ancre découverte en mer le 24 avril 2005 et provenant très probablement du navire qui transportait saint Paul & qui fit naufrage à Malte.

Le Flabellum de Saint-Philibert de Tournus – flabella et ripidia d’Orient & d’Occident

Si les flabella portés en signe d’honneur autour du Pape sont bien connus en Occident, on a généralement oublié que ceux-ci avaient connu un usage liturgique bien plus large, usage encore conservé de nos jours en Orient.

L’usage liturgique des flabella débute très haut dans l’histoire chrétienne, aussi n’est-ce guère étonnant de constater de grandes similitudes dans leur emploi en Orient comme en Occident. En effet leur emploi remonte au moins au IVème siècle, ainsi que l’atteste ce passage du VIIIème livre des Constitutions Ecclésiastiques :

“Que deux diacres, de chaque côté de l’autel, tiennent un éventail, constitué de fines membranes, ou des plumes du paon, ou de drap fin, et qu’ils chassent silencieusement les petits animaux qui volent, afin qu’ils ne s’approchent pas des calices. (VIII, 2)”

L’abbaye de Tournus, en Bourgogne, possédait un très ancien flabellum remontant à l’époque carolingienne. Ce flabellum liturgique avait été décrit comme figurant au trésor de Tournus par dom Edmond Martène et dom Ursin Durand, lors de leur mémorable campagne de collecte d’information dans tous les monastères de France en vue de la rédaction de Gallia christiana (cf. Voyage littéraire de deux religieux bénédictins de la congrégation de St-Maur, Paris, 1712 & 1724) : ils décrivent un vieux flabellum, possédant un manche d’ivoire de deux pieds de long, magnifiquement sculptés ; les deux côtés du disque comprenant quatorze figures de saints.

Ce témoignage unique se trouve actuellement conservé à Florence, en Italie, au Museo Nazionale del Bargello.

Le flabellum de Tournus est un témoin exceptionnel de part son ancienneté (il date des années 850), sa fragilité (le disque est en papier plissé et peint) et la virtuosité de son décor sculpté en ivoire (qui témoigne de la renaissance des lettres comme des arts à l’époque carolingienne, puisqu’il revivifie des textes de Virgile). C’est le plus ancien témoin occidental que nous possédions (un flabellum copte, décrit plus bas, lui est à peine antérieur de quelques années).

Ce flabellum a été offert par Génaut, abbé de Cunault, protecteur des arts, dont l’abbatiat se situe aux alentours de 850. Depuis cette époque, le précieux objet a suivi l’histoire mouvementée des reliques de saint Philibert, puisqu’il a été versé dans le trésor accompagnant la pérégrination du corps de ce saint.

Saint Philibert fut au VIIème siècle un infatigable fondateur de monastères parmi lesquels la grande abbaye de Jumièges & le monastère de l’île d’Hério (devenu plus tard Noirmoutier). Il mourut du reste, à un âge avancé, à Noirmoutier le 20 août 685. En raison des invasions normandes qui commencèrent à déferler à partir de 819, les moines de Noirmoutier entreprirent une longue errance à travers la France, emportant avec eux les reliques de saint Philibert ainsi que le trésor de leur abbaye de plus en plus loin à travers les terres. En 836, ils abandonnent Noirmoutier pour se fixer à Déas (Loire-Atlantique), puis en 845 vont à Cunault (sur la Loire en Anjou), puis 4 ans après à Messais en Poitou, près de Châtellerault, dans un domaine concédé par Charles-le-Chauve. Le Poitou étant à son tour menacé par les Normands, Charles-le-Chauve, très favorable aux moines, leur donne d’abord le lieu de Goudet près du Puy-en-Velay pour construire un nouveau monastère. Puis le 30 octobre 871, il leur concède l’abbaye de Saint-Pourçain en Auvergne dans l’Allier avec toutes ses dépendances. Le 19 mars 875, l’empereur accorde enfin comme refuge aux moines de saint Philibert l’abbaye Saint-Valérien de Tournus, avec le château et toutes ses dépendances. Les moines s’y fixèrent définitivement, renonçant à réintégrer Noirmoutier qui devint par la suite, une fois le péril normand écarté, comme Déas et Cunault, simple dépendance de Tournus. Les reliques de saint Philibert furent alors installées dans cette église qui, magnifiquement agrandie aux XIème & XIIème siècles, prendra le nom de Saint-Philibert de Tournus. Ainsi s’achève le laborieux exode des moines de Noirmoutier qui dura comme celui de l’Ecriture une quarantaine d’années. Cet exode est resté fameux en raison des très nombreux miracles accomplis par les reliques de saint Philibert à chacune des étapes de ses translations.

L’éventail de Saint-Philibert est fabriqué dans une longue bande de parchemin aux plis réguliers. La décoration s’organise en trois registres séparés par des bordures et des inscriptions. Le peintre enlumineur a utilisé plusieurs couleurs, surtout du vert et du rouge. Les motifs animaliers et végétaux du rinceau du registre supérieur s’intercalent dans le registre central avec 14 figures de saints (7 de chaque côté).

Nous empruntons au P. Juenin la description de ce fameux flabellum que l’on remarquait autrefois au trésor de l’abbaye de Tournus.

“C’est, dit-il un éventail flabellum tel que ceux dont parle Durantus son livre De Ritibus ecclesiasticis et qu’il assure d’après le pape saint Clément que deux diacres tenaient de chaque côté de l’autel pour empêcher les petits animaux volants de tomber dans le calice. Le nôtre est attaché à un manche de bois couvert d’ivoire travaillé et long de 20 pouces. Il s’ouvre en rond et a 17 pouces de diamètre. Il se replie au bout du manche où il est attaché et s’y ferme entre des plaques aussi couvertes d’ivoire longues de 8 pouces et demi et larges de 2 pouces : de telle manière qu’étant fermé toute sa longueur est de 29 pouces, dont 3 à 4 seulement, par le bout d’en bas, ne sont pas couverts d’ivoire mais aboutissent un peu en pointe comme pour être emboîtés dans un trou. L’éventail est en vélin peint de diverses figures et contient les vers suivants, qui en font connaître l’usage, mais qui ne sont pas des meilleurs, contenant des fautes contre la quantité et des transpositions.”

Voici les inscriptions qui figurent sur les diverses parties du flabellum de Tournus.

On lit d’un côté du disque de papier :

Flaminis hoc donum, regnator summe polorum,
Obtatum puro pectore sume libens.
Virgo parens Christi voto celebraris eodem.
Hic coleris pariter tu, Filiberte sacer.
Sunt duo quæ modicum confert æstate flabellum :
Infestas abigit muscas, et mitigat æstum,
Et sine dat tedio gustare munus ciborum.
Proptereà calidum qui vult transire per annum,
Et tutus cupit ab atris existere muscis,
Omni se studeat æstate muniri flabello.

Au dessus des figures qui sont représentées du même côté :

Sancta Lucia – Sancta Agnes – Sancta Cæcilia – Sancta Maria – Sanctus Petrus – Sanctus Paulus – Sanctus Andreas.

De l’autre côté :

Hoc decus eximium pulchro moderamine gestum
Condecet in sacro semper adesse loco.
Namque suo volucres infestas flamine pellit,
Et strictim motus longiùs ire facit.
Hoc quoque flabellum tranquillas excitat auras,
Æstus dùm eructat ventum, excitatque serenum,
Fugat et obcænas importunasque volucres.

Au dessus des figures :

Judex – Sanctus Mauritius – Sanctus Dionisius – Sanctus Filibertus – Sanctus Hilarius – Sanctus Martinus – Levita

Les 2 plaquettes d’ivoire qui protègent l’éventail une fois replié sont ornées d’éléments végétaux et d’un vaste répertoire animalier inspiré de Virgile.

“Les éléments profanes, inspirés des Eglogles de Virgile, et copiés sur un manuscrit de la fin de l’antiquité, sont d’un style qui rappelle les enluminures du manuscrit de Virgile au Vatican.” (W. F. Wolbach, Les ivoires sculptés, de l’époque carolingienne au XIIe siècle, in Cahiers de civilisation médiévale, 1958, Vol. 1, numéro 1.1., p. 21).

Le manche est réalisé avec des éléments en os séparés par des noeuds de couleur verte. Sur la première pomme du manche, au dessous de quatre figures en relief :

S. Maria – S. Agnes – S. Filibertus – S. Petrus.

(Saint Paul a remplacé par la suite la figure originelle de sainte Agnès).

Sur la seconde figure la signature de l’artiste, un certain Joël :

† Johel me sanctæ fecit in honore Mariæ.

La troisième pomme ne comporte point d’inscription.

L’ensemble des inscriptions renvoient à l’usage liturgique de l’objet et confirment la dédicace à la Vierge et à saint Philibert. Les flabella étaient donc utilisés autour de l’abbé célébrant la messe, à l’origine pour chasser les insectes autour de l’autel et sans doute aussi pour apporter de l’air frais les jours de grande chaleur. Cet usage purement utilitaire devait toutefois s’empreindre dès l’origine de hiératisme, à l’instar de l’usage qu’en faisait les anciens Egyptiens.

Les flabella en Orient

Dans les liturgies orientales, les flabella liturgiques sont toujours employés ; ils ont perdus au cours des âges leurs évents (de plume, papier ou tissu) et il ne subsiste plus, au bout du manche de l’objet, que le disque central – sur lequel figure usuellement un chérubin aux six ailes.

Les flabella sont désignés en grec sous le nom d’άγια ριπίδια (aghia ripidia : saints éventails) et parfois sous le terme d’εξαπτέρυγα (hexapteryga : “six ailes”). Le symbolisme angélique va particulièrement être développé en Orient. Saint Sophrone, patriarche de Jérusalem († 641) indique que, dans l’esprit de l’Eglise, les images des ripidia figurant des chérubins & des séraphins symbolisent l’invisible participation des puissances angéliques aux sacrements de l’Eglise. Saint Photius, patriarche de Constantinople († 886) témoigne qu’à cette époque les ripida étaient encore ornés de plumes. Dans son esprit, ils ont été conçus pour “prévenir l’esprit obscurci à ne pas s’attarder sur le visible, mais, en détournant son attention, à attirer les yeux de son esprit & à les détourner vers le haut, du visible à la beauté invisible & ineffable.”

Ripidion byzantin présentant un chérubin.

Ripidion copte en argent de la fin du VIIIème – début du IXème siècle.
Brooklyn Museum of Art, New York.
Les 4 animaux de l’Apocalypse, figurant les 4 évangiles, entourés chacun des six ailes, sont présentés de part & d’autre du disque.

Selon les livres liturgiques byzantins, et conformément aux Constitutions Apostoliques du IVème siècle, pendant la liturgie de saint Jean Chrysostome, deux diacres se tiennent près de l’autel avec des ripidia qu’ils agitent doucement au-dessus des saints dons, depuis l’offertoire jusqu’à la communion (mais seulement pendant la consécration pour la liturgie de saint Basile). De nos jours, comme les saints dons sont désormais couverts, cet usage est tombé en désuétude pour les diacres, sauf le jour de leur ordination diaconale : l’évêque leur remet le ripidion avec leurs vêtements diaconaux et leur livre d’office, et les présente ainsi au peuple pour l’acclamation Axios ! (Il est digne !), ensuite le diacre ordonné agitera son ripidion près de l’autel selon l’antique pratique décrite par les livres liturgiques.

Les ripidia sont portés usuellement, dans l’Orient byzantin, à l’évangile, lors de la Grande Entrée (offertoire de la Divine Liturgie) et à toutes les processions. Leur usage est souvent laissé aux sous-diacres ou aux acolytes. La photo ci-dessus montre le chant de l’évangile par le diacre à la cathédrale du Christ-Sauveur de Moscou, entouré de 4 acolytes portant des ripidia.

Les Russes les emploient fréquemment pour honorer une relique ou une icône insigne. Ci-dessus, des ripidia honorent l’icône de la Très-Sainte Trinité le jour de la Pentecôte à la Laure de la Trinité-Saint-Serge.

Lorsqu’ils ne sont pas employés, les ripidia sont disposés derrière l’autel (ou non loin de celui-ci en Russie du Nord, car l’usage s’y est établi de disposer à leur place les icônes du Christ & de la Mère de Dieu).

Les ripidia sont en usage également chez les Arméniens (qui l’appellent Kechotz), les Maronites, les Syriaques (qui l’appellent Marvahtho) & les Chaldéens. On y attache d’ordinaire de petites clochettes. On les agite à certains moments importants de la liturgie (l’épiclèse chez les Arméniens par exemple), ce qui produit un effet similaire à celui des clochettes dans le rit romain.

Marvahtho syriaque orné de branchages pour le jour des Rameaux

Les Ethiopiens enfin se servent de chasse-mouches liturgiques en crin de cheval, plus rudimentaires mais efficaces !

Sainte Sanctification (=messe) dominicale dans l’antique cathédrale d’Axoum en Ethiopie. L’un des diacres tient un cierge et un chasse-mouche liturgique.

Les flabella en Occident

Même s’il est sans doute le plus ancien témoin occidental conservé, le flabellum de Saint-Philibert de Tournus ne constitue pas un hapax, et l’instrument a été autrefois d’un emploi fréquent. En 813, on signale un flabellum en argent dans l’inventaire de l’abbaye de Saint-Riquier en Ponthieu (Migne, P. L., CLXXIV, 1257). Le testament d’Everard (mort en 837), fondateur de l’abbaye de Cisoin en mentionne un autre. L’inventaire du trésor de la cathédrale de Sarum (Salisbury, en Angleterre), daté de 1222, mentionne un flabellum en argent et deux en parchemin. L’inventaire de la cathédrale d’York recèle à la même époque un flabellum dont le manche était d’argent et le disque doré, lequel portait une image en émail de l’évêque. Haymon (Hamo Hethe), évêque de Rochester (mort en 1352), a laissé à son Eglise un flabellum d’argent à manche d’ivoire. La cathédrale Saint-Paul de Londres en possédait un orné de plumes de paon.

L’abbaye de Kremsmünster en Haute-Autriche possède toujours un très intéressant flabellum du XIIIème siècle : dans les quartiers dessinés par une croix grecque est représentée la résurrection du Christ.

Metropolitan Museum de New York.

L’usage liturgique du flabellum semble s’être un peu partout éteint en Occident à partir du XIVème siècle. L’invention de la pale pour recouvrir le calice (qui remonte au moins au XVIème siècle), accéléra, comme en Orient, sa désuétude.

Toutefois, il s’est maintenu en Occident dans quelques usages particuliers.

Le Pape – ainsi que nous l’avons noté au début de cet article – était, jusqu’au dernières réformes liturgiques, accompagné de deux flabella. Les plumes de paon dont ils étaient confectionnés, à cause de leurs ocelles, symbolisaient le regard, et donc la vigilance du pape sur l’ensemble de l’Église.

Le vénérable Pie XII porté sur la sedia gestatoria et entouré des deux flabella.

Saint Jean XXIII porté sur la sedia gestatoria et entouré des deux flabella.

L’archevêché de Lisbonne a été érigé en patriarcat par la bulle “In Supremo Apostolatus Solio” du 22 octobre 1716, afin de tenir compte de son autorité spirituelle sur l’ensemble de l’empire colonial portugais (mais aussi afin de remercier le Portugal pour son aide dans la lutte contre les Turcs). Le patriarche de Lisbonne possède depuis plusieurs privilèges, dont celui d’être accompagné de deux flabella.

S.E. Manuel, cardinal Gonçalves Cerejeira, patriarche of Lisbonne de 1929 à 1971, accompagné par ses flabella. Notez aussi la mitre du patriarche qui imite la forme de la tiare papale (le patriarche de Lisbonne timbre ses armes d’une tiare sans les clefs).

Le rit dominicain connait l’usage du flabellum. Voici une photo d’une messe solennelle célébrée dans le rit dominicain. Les 2 flabella sont tenus par les acolytes agenouillés.

Flabellum dans le rit dominicain

Voici encore quelques usages des flabella en Occident, dans des cadres un peu moins prestigieux mais toujours actuels (et, du reste, dans un contexte de nouveau rit).

Procession de reliques avec flabella sur l’île de Malte.

Procession des reliques de saint Liboire précédé du flabellum en la cathédrale de Paderborn (dans l’antique Saxe, actuellement en Rhénanie-du-Nord-Westphalie).
Plus d’informations & de photos sur cette procession.

Et pour finir, voici une photo de la procession des rameaux dans la paroisse anglicane de Saint-Timothée, à Fort-Worth au Texas :

En conclusion, même si l’usage des flabella pourrait paraître désuet dans notre monde moderne, leur histoire extrêmement ancienne est aussi un témoin indirect de la grande vénération et de la prudence extrême dont la Sainte Eglise a entouré dès l’origine les saints dons eucharistiques, et par là même l’affirmation de sa foi en la présence réelle de notre Seigneur sous les espèces du pain & du vin.

PS. : plus de photos pour illustrer cet article sur cet album de la page Facebook de la Schola Sainte Cécile.